Éducation : « La réussite scolaire n’est pas directement corrélée au milieu social, le type de territoire joue également un rôle »

Eduquer ou périr Ki AZERBO ; Faire des enfants est un projet, ne laissons pas au hasard et  au destin  notre avenir, nous sommes responsables de nos actes pour l’essentiel. La Tête sait ce qu’elle peut porter ou pas , alors agissons en conséquence .et protégeons nos enfants.  P B Cissoko

Dans un volumineux et instructif ouvrage, intitulé « Géographie de l’école », la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (Depp) décrit le système scolaire et de formation sous la forme de 36 fiches thématisées. Un dossier met, par ailleurs, en lumière les disparités territoriales à l’école et leurs conséquences sur les parcours scolaires et les résultats des élèves.

Par Ludovic Galtier

Au moins autant qu’à la condition sociale, les écarts de résultats et de parcours scolaires des élèves sont liés au « type de territoire »  sur lequel ils vivent. C’est l’un des enseignements du dossier présenté en toute fin de l’ouvrage Géographie de l’école, publié en juin sur le site du ministère de l’Éducation nationale. Pour « mesurer »  ces inégalités territoriales en matière de résultats et de parcours scolaires, la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (Depp) a procédé à deux types d’études complémentaires.

La première approche est une analyse des écarts de résultats et de parcours scolaires entre cantons. La deuxième, elle, vise à caractériser les cantons et les types de territoire selon trois critères sociaux et scolaires* : l’indice de position sociale (IPS), c’est-à-dire le milieu social des élèves, la note moyenne aux épreuves écrites du diplôme national du brevet (DNB) et le taux de passage en seconde générale et technologique (GT).

« La géographie de la réussite au brevet ne suit que partiellement celle du milieu social » 

En mixant toutes ces données, Fabrice Murat, qui signe le dossier, s’aperçoit que « la géographie de la réussite au brevet par canton ne suit que partiellement celle du milieu social ». En effet, selon lui, la carte des résultats du brevet « donne une image un peu différente »  de l’analyse cartographique des IPS par canton qui « fait clairement apparaître une concentration des cantons à IPS élevé autour des grandes métropoles, en particulier en Île-de-France ».

S’il « existe un lien certain entre les deux informations, la relation n’est pas parfaite. »  En particulier, poursuit-il, « les grandes métropoles ne ressortent pas avec des résultats scolaires nettement meilleurs. L’ouest de l’Île-de-France, par exemple, se détache très peu en termes de réussite au DNB, alors que cette zone apparaît très favorisée socialement ».

À l’inverse, les deux zones de réussite qui apparaissent sont la Bretagne et les Pays-de-la-Loire, « où les cantons en réussite scolaire paraissent bien plus nombreux que ce que laisse attendre le milieu social », et un arc sud-ouest/nord-est pourtant « situé en dessous de la diagonale des difficultés sociales », partant des Pyrénées-Atlantiques, passant par le sud du Massif Central, le haut de la vallée du Rhône, pour finir en Franche-Comté.

« Déficit en termes d’orientation vers la voie générale et technologique dans les communes rurales » 

Les disparités territoriales concernant le parcours scolaire « ne s’expliquent donc que partiellement par des différences sociales ou de compétences ». D’autres facteurs peuvent intervenir, explique Fabrice Murat : « Les communes rurales se distinguent par un déficit en termes d’orientation vers la voie générale et technologique (GT), qui peut être en partie relié à des aspirations personnelles et professionnelles différentes, mais aussi à une offre de formation moins diversifiée ».

En répartissant les communes en quatre catégories (rural éloigné, zones périphériques, urbain éloigné et urbain dense), Fabrice Murat se rend compte que « l’orientation dans la voie générale et technologique est bien moins fréquente dans les zones rurales par rapport aux communes urbaines denses. Le taux de passage en seconde GT est, en effet, sensiblement plus bas (57 % contre 65 % pour l’ensemble des élèves) »  dans les communes rurales éloignées malgré des résultats au DNB assez proches de la moyenne nationale.

« Ainsi, les taux inférieurs à la moyenne en Bourgogne-Franche-Comté, en Normandie et Pays de la Loire, alors que les résultats au DNB sont plutôt favorables, peuvent être mis en relation avec l’importance des communes rurales dans ces régions. Inversement, les orientations plus fréquentes en seconde GT en Île-de-France et PACA peuvent être associées à la surreprésentation des communes urbaines denses ». Une tendance qui confirme que « les élèves ruraux (en particulier les garçons) s’orientent davantage vers des filières courtes et professionnelles que les élèves urbains », comme la fiche 1 le met en évidence.

« La taille des classes du premier degré a sensiblement diminué » 

Les élus locaux pourraient tout aussi bien lire avec attention la fiche 16, qui détaille les conditions d’accueil dans le premier degré. On y apprend que les 1664 bassins de vie qui structurent la France possèdent au moins une école publique ou privée. « Les écoles de deux classes ou moins représente 19 % des écoles mais accueillent seulement 4,5 % des élèves du premier degré, soit 294 500 élèves. À l’opposé, 27 % des écoles comptent huit classes ou plus et scolarisent 3 410 000 élèves, soit plus de la moitié d’entre eux ».

Autre constat : on compte « davantage de petites écoles dans les zones rurales et de grandes écoles en zone urbaine et dans les DROM ». Entre les rentrées 2015 et 2020, enfin, « la taille des classes du premier degré a sensiblement diminué : de 1,5 élève pour les classes de niveau préélémentaire et de 1,8 pour celles de niveau élémentaire. Ceci s’explique notamment par le dédoublement des classes de CP-CE1 en éducation prioritaire et à partir de la rentrée 2020, de celles de grande section de maternelle. »

*Ces indicateurs ont été calculés à partir des données exhaustives concernant les élèves de troisième générale, de l’année scolaire 2005-2006 à l’année scolaire 2015-2016, soit plus de 8 millions d’élèves.

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Lire ceci pour l’Afrique

 

 

L’inquiétante faiblesse du niveau scolaire en Afrique

La Banque mondiale a publié une longue étude sur l’école dans les pays en voie de développement. Elle démontre qu’en dépit d’un taux de scolarité élevé, le niveau réel des élèves demeure trop faible, notamment sur le continent africain.

Par Tanguy Berthemet

Publié le 28/09/2017 à 17:17, mis à jour le 28/09/2017 à 17:36

Si le taux de scolarité en primaire a explosé en Afrique au cours des 30 dernières années, pour atteindre presque 90%, les progrès des élèves n’ont pas suivi. TADEU ANDRE/AFP

L’école est sans doute la meilleure solution pour sortir de la misère mais à condition qu’elle remplisse son rôle. Or, dans un rapport publié lundi, la Banque mondiale souligne les immenses carences de cette institution dans les pays les plus pauvres. Personne n’ignorait que les performances des écoles primaires dans les États en voie de développement étaient loin de celles des États riches. Mais les données de la Banque mondiale démontrent que le gouffre qui sépare ces deux mondes est bien plus important que prévu. Une très mauvaise nouvelle quand on sait que le niveau de vie à l’âge adulte dépend directement du niveau d’éducation réel.

L’Afrique souffre particulièrement. Si le taux de scolarité en primaire a explosé sur le continent au cours des 30 dernières années, pour atteindre presque 90%, les progrès des élèves n’ont pas suivi. «Pour un trop grand nombre d’enfants, scolarisation n’est pas synonyme d’apprentissage», résume brutalement Paul Romer, l’économiste en chef de la Banque mondiale. Les chiffres sont parfois effarants. Ainsi, au Niger, à peine 3% des enfants de CM2 auraient un niveau de langue satisfaisant, les résultats en mathématique n’étant pas meilleurs. Le niveau au Mali n’est guère plus brillant. Ces difficultés ne semblent pas être l’apanage d’un héritage colonial, les pays anglophones ne s’illustrant pas plus. Le Malawi affiche de très mauvais scores: plus de 90% des élèves en fin de CE1 ne sont pas capables de lire un mot. Au Ghana, le chiffre est de 80%. Plus surprenant, le Kenya, la Tanzanie ou l’Ouganda sont aussi très à la traîne. «Lorsqu’on a demandé récemment à des élèves de troisième année du primaire au Kenya, en Tanzanie et en Ouganda de lire en anglais ou en swahili une phrase du genre «le nom du chien est Fido», trois quarts n’ont pas compris ce que cela voulait dire», précise le document. Ce résultat est d’autant plus catastrophique que 77% des petits Africains ne finissent jamais le collège quand plus de 85% bouclent ce cycle en Europe de l’Est.

Faire en sorte que les élèves mangent bien et soient en bonne santé

Le niveau de lecture cache certes des disparités importantes. Sans surprise, les enfants issus des milieux favorisés réussissent bien mieux. Ainsi au Togo, 30% des plus aisés sont sous le niveau moyen attendu en lecture en 6e contre 90% des pauvres. Chez ces derniers, seuls 1% (des filles exclusivement) ont un niveau considéré comme élevé. Ce que l’étude met en revanche en lumière est ce clivage riches-pauvres ne fonctionne pas pour tous les pays. Malgré son économie dynamique, le Kenya obtient de mauvais résultats au contraire du pauvre Burundi. Ce petit pays d’Afrique centrale peut se targuer d’une certaine réussite. Plus de 60% des enfants pauvres sont, toujours en 6e, au-dessus du niveau attendu, les jeunes filles pauvres sont même plus de 70% et devant leurs compatriotes favorisées (65%).

Le Burundi démontre que les raisons de cet échec scolaire, si elles sont grandes parties liées au manque de moyens, sont d’origines multiples mais sont curables. Le faible salaire des professeurs, et donc leur manque d’engagement, est souligné. Lors des inspections en Ouganda, près de 50 % des maîtres n’étaient pas dans leur classe, 30% n’étant même pas dans l’école. Des chiffres qui sont les mêmes au Mozambique, ou de 30% au Sénégal. Une aide aux professeurs est donc l’une des solutions prônées par la Banque mondiale pour renverser la tendance.

Mais pour les experts, outre augmenter les moyens, la piste principale consiste à mettre en place une coordination entre les différents acteurs ainsi que des évaluations pour connaître le niveau réel des élèves. Le rapport remet aussi au goût du jour des idées aussi simples qu’anciennes: faire en sorte que les élèves mangent et soient en bonne santé. Une étude britannique a démontré que des élèves convenablement nourris faisaient plus de progrès que ceux auxquels on avait fourni des livres de classe et du matériel. Une autre analyse a permis de mettre en avant que le traitement des parasitoses – qui ont aussi parfois un effet sur les performances cognitives – faisait baisser de 25% l’absentéisme. Ce traitement ne coûte que 3,20 dollars par élève et par an.

https://www.lefigaro.fr/international/2017/09/28/01003-20170928ARTFIG00249-l-inquietante-faiblesse-du-niveau-scolaire-en-afrique.php