Connaître nos anciens et précurseurs. Uil ya eu des systèmes traditionnels de gestion des peuples et des communes. Certains se basent sur la charia, ce qui est intéressant c’est de comprendre le fonctionnement et la vision qui les habitaient pour les humains . Voici des articles qui nous permettent de comprendre un peu. P B C
Almamy Abdoul Khadre Kane, premier Almamy du Fouta. Almamy Abdoul Khadre Kane est né en 1726 à Paffa Warma dans le Saloum. Ses descendants étaient de grands marabouts. Ils avaient de grands cours avec plein de disciples et vivaient au village de Dimate, dans le département de Podor. Ils restent dans ce village jusqu’au jour où El Hadji Lamine Kane, le père de Abdel Kader, décide de partir pour la bourgade de Kobilo où règne un roi païen. Ce dernier et le marabout décident de l’entente cordiale.
Pour réussir un pari aussi risqué, ils décident de mettre en place un pacte. Dans le document, les droits de tout le monde sont respectés. Ils vivent en harmonie jusqu’au jour où le marabout décide de faire une pérégrination vers le centre du pays. El Hadji Lamine Kane arrive dans le Saloum où il s’installe avec ses disciples. Ils sont plusieurs dizaines de personnes. Et c’est dans cette région du Sénégal que naquit, en 1726, son fils qu’il baptise Abdel Kader. Le marabout assure l’éducation de son fils. De cette école, le jeune Abdel Kader devient l’un des érudits de sa génération. Ce qui permet son admission à l’université de Pire avec 11 autres dignitaires torodos dont Souleymane Baal, Elimane Boubacar, Abdoul Karim Daff, Thierno Bayla Sow. Au cours de son séjour à Pire, il fait la connaissance de la mère du Damel du Cayor, Amary Ngoné Ndella Fall. Une connaissance qui vaudra son pesant d’or dans son histoire.
A l’époque, la loi du plus fort règne dans le Fouta avec la dynastie des Deniyanké. Sans compter le tribut que réclament les Maures qui traversent le fleuve au peuple Foutanké. Conscients qu’ils sont les mieux placés pour libérer le Fouta de cette emprise, les 12 étudiants se concertent sous la barrière de Souleymane Baal et mettent en place une stratégie pour libérer leur patrie et implanter un royaume musulman. Ils devaient à la fin de leurs études, mailler le territoire foutanké pour dispenser leurs sciences religieuses et apprendre ainsi, petit à petit, au peuple foutanké à prendre sa destinée en main.
Après avoir quitté l’université de Pire, Abdel Kader s’implante dans le Boundou, au village de Diamwélé où il met sur pied son premier daara. Le chef religieux fait plus qu’apprendre à ses disciples le Coran et les préceptes de l’Islam. Il commence sa propagande contre le règne des Déniyankés et fait le tour des villages pour inciter ses concitoyens à refuser l’oppression. De leur côté, les 11 autres érudits font la même chose. De la propagande auprès des populations Foutankés. Par la suite, la bande des douze se donnent rendez-vous à Oréfondé pour une grande assemblée générale à l’issue de laquelle une constitution est mise sur pied. Dans la charte suprême, il était envisagé que le roi qui serait élu devrait être un bon musulman, un homme cultivé et honnête. Il devait aussi être un grand guerrier. Après son élection, s’il faisait régner l’injustice, le peuple Foutanké avait l’obligation de le destituer, le tuer s’il le faut. Enfin, il a été décidé que le pouvoir n’allait pas se transmettre de père en fils. Que c’est le peuple du Fouta Toro souverain d’élire le roi son almamy, titre donné au roi dans la constitution. Une bataille contre les forces impérialistes maures est aussitôt envisagée. Souleymane Baal, le chef des 12 dignitaires torodos, y sera tué. Cela n’empêche pas le Fouta d’obtenir son indépendance. Ainsi débute le règne des Almamy.
Mais les choses ne sont pas aussi simples qu’elles le paraissent. La démocratie étant un nouvel exercice pour le peuple foutanké. Il fallait donc élire un Almamy de la façon la plus démocratique. Tout le Fouta Toro devait se prononcer pour désigner son souverain. Pour réussir le coup, une commission électorale parcourt le Fouta à la recherche d’un homme qui remplit toutes les conditions posées dans la Constitution. Le candidat est vite trouvé en la personne de Abdel Kader Kane. Les membres de la commission désignent le chef religieux comme le roi du Fouta Toro. Surpris par cette décision, l’érudit refuse de s’asseoir sur le trône.
Abdel Kader estime que d’autres fils du Fouta sont autant dignes que lui d’occuper cette place suprême. Mais la commission est bien déterminée à faire respecter sa volonté. Comble de l’ironie, le futur Almamy est jugé et condamné par le tribunal de l’époque à accepter son rôle de dirigeant, s’il ne veut pas être tué. Dos au mur, Abdel Kader Kâne finit par accepter… sous quelques conditions. D’abord, il impose l’application de la Charia. Le nouvel Almamy prescrit l’égalité des Foutankés devant la Constitution. Une autre charte impose à tout le monde, sauf les femmes, les enfants et les vieillards, à prendre part aux guerres saintes. Les quatre frontières du Fouta doivent aussi être gardées en permanence. En 1776, Abdel Kader Kâne est officiellement intronisé Almamy du Fouta Toro. Il s’installe à Thilogne qui devient la capitale. Ca le restera 20 ans, avant d’être déplacé à Kobilo, la terre des aïeuls du souverain.
Mort par traîtrise, la politique de l’Almamy est principalement axée sur le religieux.
Des écoles coraniques sont érigées, des mosquées édifiées. «Trente-trois au total». Un Caadi (juge) et son adjoint sont élus dans chaque village. Et un chef est installé à la tête de chaque bourgade. Dernière décision, le nouvel almamy a érigé une loi pour exiger que l’aumône des habitants du Fouta demeure au Fouta. Le nouveau maitre du Fouta prend ainsi ces décisions pour implanter et pérenniser la démocratie et l’état de droit dans son royaume. Seulement, il existe d’autres problèmes qui viennent d’ailleurs. Surtout avec la traite négrière. Il écrit au gouverneur de Saint-Louis de l’époque pour lui notifier son refus d’asservir les fils du Fouta.
Aussi, les bateaux qui traversaient le fleuve devaient-ils payer des impôts. Plein d’initiatives qui ne sont pas du goût de certains dignitaires torodos qui gagnent dans le trafic d’esclaves. Ce qui fait que ses plus proches collaborateurs deviennent ses ennemis jurés, alors qu’il ne se doute de rien du tout. Almamy Abdel Kader, conquérant devant l’Eternel, multiplie les conquêtes et participe à plusieurs batailles dont celle de Boungowi. Ce sera sa dernière. Il sera capturé et emprisonné par le Damel du Cayor, Amary Ngoné Ndella Fall. Il est fait prisonnier durant 6 longs mois. Dans le Fouta, ses adjoints ont pris les rênes du pouvoir. En captivité, Abdel Kader revoit la mère du roi du Cayor qu’il avait connue à Pire.
«La reine mère du Cayor raconte à son fils comment Abdel Kader, par des bénédictions, lui a permis de l’enfanter». Un plaidoyer qui ne laisse aucun choix au Damel du Cayor qui libère le roi du Fouta. Mieux, il le reconduit sur son trône avec plusieurs centaines d’hommes. Abdel Kader ne se doute pas qu’à son absence, les choses se sont détériorées et que certains de ses plus proches ministres nourrissent des projets pour le destituer. Ils s’étaient même ligués au roi ennemi du Boundou. En pérégrination dans les zones reculées du pays, Almamy laisse le champ libre aux conjurés. Six familles torodos planifient son assassinat. Ils le surprennent au village de Gouriki Samba Dior, le 4 avril 1807. Sachant qu’il ne peut pas s’échapper, il se rend et leur révèle qu’il ne peut être tué avec du fer.
Que ce soit une épée, une arme à feu ou un couteau. Abdel Kader demande également à satisfaire une dernière volonté, celle de prier deux raakas avant de mourir. Ses ennemis le laissent faire, avant de lui percer le cou, de gauche à droit, avec un morceau de bois pointu. La mort du premier Almamy est le début d’une malédiction qui poursuit à jamais les six familles torodos. «Les descendants de ces familles traitresses sont condamnés à ne jamais voir la tombe d’Abdel Kader Kane, au risque de tomber raide mort», révèle le descendant. Après l’assassinat du premier Almamy, le Fouta se disloque et se retrouve avec plusieurs rois. Tomber de rideau !
Tagged Abdou Khadre Kane, Almamy, Fouta, Oeuvre, Vie
Blogueur, Activiste, Rédacteur Web et Entrepreneur, Yéro GUISSE est un jeune Sénégalais passionné des nouvelles technologies et des nouveaux médias. . J’essaie à travers ce blog d’apporter mes idées et mes contributions sur la marche de mon pays. Je suis pour un Sénégal des valeurs.
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Sénégal: Livre / « L’imam Abdel Kader Kane… » – Thierno Bocar Kane réhabilite Abdel Kader Kane
Par Seydou Ka
Dans cette pièce dramatique, Thierno Bocar Kane revisite l’une des pages les plus glorieuses de l’histoire du Fouta, l’épopée de son premier Etat théocratique et le geste d’un de ses plus grands souverains : l’Almamy Abdel Kader Kane de Kobbilo.
Même si elle est convoquée çà et là par quelques historiens pour montrer que l’Afrique connaissait une forme de démocratie bien avant la colonisation, il existe très peu de littérature sur la révolution « torodo ». Thierno Bocar Kane vient corriger, en partie, ce manque avec une pièce de théâtre consacrée à « L’imam Abdel Kader Kane et la charte des Almamys du Fouta ». Avec brio et sens de la mesure, l’auteur nous replonge dans l’ambiance de cette page glorieuse de l’histoire du Fouta.
Treize ans avant la Révolution française de 1789, l’Almaami Abdoul Kader Kane avait déjà interdit la traite négrière dans son pays- Babacar Baye NDIAYE-Ndar info
Dimanche 12 Octobre 2014
Almaami Abdoul Kader Kane
Almaami-Abdoul-Kader-Kane.jpgPlus de 250 ans après sa mort, la vie d’Abdoul Kader Kane qui a été désigné par ses pairs intellectuels Torobbe comme premier Almaami du Fouta-Toro (regroupant le nord du Sénégal et le sud de la Mauritanie) après leur victoire contre le pouvoir Denyanké qui a régné sur le Fouta-Toro de 1512 1776 suscite de plus en plus d’intérêts chez les chercheurs africains.
Dans son dernier livre intitulé « Lumières noires de l’humanité : inventeurs, héros, artistes et sportifs », le Dr Oumar Dioume de l’Institut Fondamental d’Afrique Noire (I.f.a.n.) de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar lève un coin du voile sur la vie de l’Almaami Abdel Kader Kane.
De ce chef politique et religieux qui dirigea le Fouta-Toro de 1776 à 1806 ou 1807, on retiendra qu’il a été celui qui a interdit la traite négrière et donna l’indépendance nationale au Fouta-Toro. Le Dr Oumar Dioume nous apprend qu’Almaami Abdoul Kader Kane, au non des principes de la défense des droits de ses mandants, a, treize ans avant la Révolution française de 1789, interdit la traite négrière dans son pays.
Avec cette interdiction de la traite négrière, l’Almaami Abdoul Kader Kane emboita ainsi le pas aux Quackers (secte chrétienne) de Philadelphie qui étaient les seuls dans le monde à avoir aboli l’esclavage aux Etats-Unis d’Amérique en 1776.
D’ailleurs, ce caractère révolutionnaire de la lutte d’Almaamy Abdoul Kader Kane contre la traite négrière est corroboré par le Professeur Oumar Kane dans son livre de référence « La première hégémonie peuhle, Le Fouta Toro de Koly Tengella à Almaamy Abdoul, 1512 à 1806 ».
Dans le même ordre d’idées, dans son récit intitulé « Observations sur la traite des nègres, avec une description de quelques parties de la côte de Guinée, durant un voyage fait en 1787 et 1788 avec le docteur A. Sparganier et le capitaine Arrhenius », le suédois Carl Bernard Wadstrom confirme cette particularité.
« La conduite du roi actuel d’Almaamy (autrefois grand marabout) est plus intéressante pour l’humanité et prouve la fermeté du caractère mâle des Nègres lorsqu’ils ont acquis quelques lumières. Comme son esprit a été plus cultivé dans sa jeunesse que celui des autres princes noirs, il s’est rendu tout à fait indépendant des Blancs. Il a non seulement défendu la traite des esclaves dans ses Etats, mais (en 1787) il n’a pas même voulu permettre aux Français de faire passer par ses Etats les captifs de Gallam. Il rachète ses propres sujets lorsqu’ils ont été pris par les Maures, et il les encourage à élever des troupeaux, à cultiver la terre et à exercer leur industrie de toutes les manières », avait écrit Carl Bernard Wadstrom.
Les faits sont là et les témoignages sur l’action de l’Almaamy Abdel Kader Kane d’abolir la traite négrière sont nombreux. Cet homme qui « a porté sur le trône plus de lumière que ses prédécesseurs » a tenu tête face au colonialisme français qui « a excité contre lui les Maures qui l’ont attaqués et qu’il a vaincus » reste aux yeux de Pruneau de Pommegorge, ancien membre du Conseil du Sénégal, celui qui « a défendu dans tout son pays les pillages, ni de faire aucun captif ; et, enfin par d’autres moyens politiques (et au fonds très humains) il est parvenu à repeupler son vaste royaume, à y attirer des peuples qui y trouvent leur sûreté.(…).ainsi voilà un homme d’une contrée presque sauvage, qui donne une leçon d’humanité à d’autres peuples policés, en défendant dans tous ses Etats la captivité et les vexations ».
L’Almaamy Abdoul Kader Kane va plus loin dans sa lutte contre la traite négrière en attaquant les royaumes négriers voisins comme ceux du Cayor et du Walo. Mais, il sera vaincu en 1790 à la bataille de Boungowi par le Damel Amari N’Goné N’Della Coumba aidé par le double jeu du Brack du Walo et la complicité du comptoir négrier de Saint-Louis qui a fourni à crédit des fusils au Damel moyennant le remboursement en esclaves en contrepartie.
Fait prisonnier par le Damel, l’Almaamy Abdoul Kader Kane n’a jamais renié ses convictions à savoir combattre la traite négrière et donner au Fouta Toro son indépendance. Son almaamyat a marqué le 18ième siècle. Ainsi, aucun des Almaamis qui l’ont succédé n’a remis en cause l’interdiction de la Traite négrière qu’il a décrétée en 1776.
Même si, le mode de dévolution du pouvoir à l’Almaami Abdoul Kader Kane et l’abolition de la traite négrière par l’Almaamyat du Fouta-Toro sont une contribution inestimable, il n’en demeure pas moins que cette contribution soit méconnue à la cause de la défense des Droits de l’Homme et notamment en Mauritanie.
Babacar Baye NDIAYE