Les logiques absurdes-De la dialectique néoplatonicienne aux logiques non classiques-Frédéric Berland

«Un ouvrage à posséder et qui fera date et tache. Une autre façon de penser. Cet ouvrage qui rompt avec la tradition, me fait penser à deux ouvrages qui remettent en question ou réorientent la pensée vers des ailleurs. Je pense au livre de DORTIER « De Socrate à Foucault » ou certaines grandes théories philosophico-scientifiques sont battues en brèche et l’ouvrage de AMARTYA S’EN que le doyen Cherif  Salif SY m’avait soufflé «La démocratie des autres ». Il est bon, quand c’est nécessaire de changer les regards, pour décentrer la tyrannie des soient disant dépositaires de la Vérité Absolue ». Pape B CISSOKO

Cet ouvrage est le fruit de sa thèse « Thèses en préparation à Paris 8 , dans le cadre de 31 « Pratiques et théories du sens » , en partenariat avec Laboratoires d’études et de recherches sur les logiques contemporaines de la philosophie (équipe de recherche) depuis le 11-12-2014 « .

La logique classique, qui repose sur trois principes fondamentaux (d’identité, de non-contradiction et de tiers-exclu), a pu séduire par son efficacité  : orientée vers l’être, elle permet d’appréhender la cohérence du réel, donc de développer les savoirs. Pour autant, sa puissance s’avère limitée dans certaines situations  : des limitations internes des formalismes à l’apparition de nouveaux objets paradoxaux, la science du xxe  siècle a été confrontée à une crise de ses fondements dont elle n’est pas encore sortie. Or, s’affranchir de ce qui vient en nous entraver la pensée a été un enjeu pour des courants soucieux de fonder leur rigueur démonstrative sur un au-delà de l’être. Dans la lignée de l’hénologie néoplatonicienne, ces modes d’explication ont néanmoins souvent été jugés irrationnels, mystiques ou simplement absurdes.

À l’aide des logiques non standards contemporaines, c’est une étude systémique de ces positions qui est ici envisagée à travers la critique de l’hégémonie des trois grands principes logiques  : grâce à la logique intuitionniste, il devient possible de construire rigoureusement la notion de néant suressentiel ; grâce aux logiques paraconsistantes, les contradictions et les paradoxes qu’une telle dialectique engendre perdent leur caractère irrationnel ; enfin, grâce aux traditions logiques indiennes et japonaises, le principe d’identité peut lui-même être questionné. Cette remise en cause radicale de nos certitudes les mieux ancrées permet ultimement de dégager de nouvelles perspectives à la pensée logique.

Frédéric BERLAND : « C’est aujourd’hui que sort « Les logiques absurdes », un ouvrage qui cherche à redonner aux raisonnements « mystiques » leurs lettres de noblesses  in face book

Dans le ,livre page 9 «la géométrie non-euclidienne n’est pas faite pour contredire la géométrie euclidienne. Elle est plutôt une sorte de facteur adjoint qui permet la totalisation, l’achèvement de la pensée géométrique, l’absorption dans une pangéométrie

*Notre but consiste en ce sens à cerner ce que pourrait signifier une panlogique. Néanmoins, si la ,logique de l’être n’est plus considérée comme le fondement de notre système de connaissances, alors le principal problème de cette panlogique sera de rendre compte de la provenance de cet être advenu depuis  ce que nous nommerons  parfois par commodité non-être, en prenant bien soin de ne pas comprendre cette négation comme une simple privation, mais comme une négation intensive que nous nommerons «  supernégation » …

in cairn

Frédéric Berland    Dans Les logiques absurdes (2023), pages 5 à 25

L’absurdité effraie les logiciens. Pour eux, elle fait souvent office de figure repoussoir, de faillite de la rationalité. L’absurdité est l’équivalent en logique de ce qu’est la mort en morale : la peur du non-sens hante nos raisonnements, tout comme l’angoisse du non-être nos existences – à la manière d’un spectre dont l’irréalité serait insoutenable. C’est ce lien entre notre rapport au néant et notre rapport au non-sens que nous voulons approfondir : tant que nous concevons le néant comme relatif, c’est-à-dire comme une privation d’être, le non-sens apparaît lui-même comme une limite au-delà de laquelle le rationnel disparaît. Pourtant, il est possible de penser le non-être autrement, notamment grâce à une logique qui inclut davantage les significations paradoxales, celles que les logiciens disqualifient trop souvent d’emblée en les considérant comme de simples aberrations incohérentes. La logique des paradoxes ou les philosophies du Néant absolu permettent par exemple de concevoir une pensée dialectique qui ne soit plus fondée sur les principes d’identité, de non-contradiction et du tiers exclu. C’est à la compréhension de cette voie que la présente enquête est consacrée.
Dans la mesure où les démonstrations par l’absurde se fondent sur le principe de contradiction (pour stériliser la thèse à laquelle nous nous opposons) et du tiers exclu (pour déduire de cette stérilisation la thèse opposée comme seule alternative), il est possible de comprendre qu’une logique qui se proposerait de s’affranchir de l’un de ces deux principes, une logique que le bon sens décrirait donc comme une « logique absurde », puisse sembler soit triviale soit trop faible…

Merci à Manon  DONDON DES EDITIONS HERMANN