Effacer pour mieux régner : le nouveau Tipp-Ex institutionnel

Décidément, il fallait oser. Notre très inventif président de l’Assemblée nationale vient d’apporter sa pierre à la modernisation institutionnelle du pays : il propose purement et simplement d’effacer la Cour suprême. Oui, oui, comme on efface un mauvais mot au tableau. On imagine déjà un ministre avec une craie dans une main et une gomme dans l’autre : « Hop, plus de juge ! »

Selon lui, la justification est imparable : cette vénérable institution « empêche le gouvernement de tourner en rond ». On se demande si ce n’est pas justement son rôle : éviter que nos dirigeants deviennent des toupies incontrôlables, tournoyant sans frein jusqu’à s’écrouler sur la moquette du Palais.

Mais ce n’est pas tout. Dans un élan de franchise désarmante, le président de l’Assemblée nous révèle que toute l’ossature de Pastef – y compris le président de la République – rêve de transférer le pouvoir à Ousmane Sonko, l’éternel « premier premier ministre ». Voilà une nouvelle catégorie constitutionnelle inventée : après le Premier ministre, voici le Premier du Premier.

On pourrait en rire si ce n’était pas aussi pathétique. Comment peut-on déjà songer à « passer le témoin » alors que la course n’est même pas à mi- parcours ? Voilà donc un régime qui, au lieu d’écrire son bilan, s’empresse de rédiger son testament politique.

En attendant, les Sénégalais, eux, n’ont pas besoin de Cour suprême pour savoir reconnaître une sottise quand elle leur saute aux yeux.

Ibrahima Thiam, Président du parti ACT