Depuis l’accord commercial avec les États-Unis, la présidente de la Commission européenne fait face à des critiques à travers l’Europe. Les critiques les plus virulentes sont d’abord venues de France et continuent de plus belle depuis qu’Emmanuel Macron y a ajouté les siennes ce mercredi 30 juillet, mais elles ont trouvé un écho ailleurs en Europe. Au-delà de l’accord avec les États-Unis, c’est l’ensemble de la « méthode von der Leyen » à la tête de la Commission européenne qui souffre actuellement d’un éclairage négatif.
Nul n’est prophète en son pays, doit se dire Ursula von der Leyen au vu des critiques sévères venues d’Allemagne, rapporte notre correspondant à Bruxelles, Pierre Benazet. La puissante fédération des industries allemandes (BDI) juge inadéquat le compromis avec les Étas Unis.
Elle ajoute que l’absence d’accord sur l’acier est « un coup bas », jusqu’au chancelier Friedrich Merz, pourtant du même parti qu’Ursula von der Leyen, la CDU. Son ton a changé puisqu’il voit désormais dans l’accord commercial « un fardeau considérable » pour l’économie allemande. On a même entendu les mots « humiliation » ou « soumission » dans les commentaires issus des partis de la coalition allemande.
Le 27 juillet en Écosse, comme à son habitude, Ursula von der Leyen a voulu se mettre en avant, mais le retour de manivelle est sévère. Elle a survécu sans coup férir à une motion de censure début juillet. Mais pour autant, les critiques ne faiblissent pas au Parlement, et au sein même de la Commission, son habitude de prendre les décisions seule finit par heurter certains. À l’inverse, le style discret du commissaire au Commerce Maroš Šefčovič lui permet de tirer son épingle du jeu, alors que c’est lui qui a mené les négociations avec les États-Unis.
Poursuite des négociations
L’accord sur les droits de douane conclu entre Donald Trump et Ursula von der Leyen doit entrer en vigueur ce vendredi 1er août. Avec 15 % de droits de douane sur les produits européens qui entrent aux États-Unis, c’est le terrain d’entente trouvé entre la Maison Blanche et la Commission européenne la semaine dernière. Un accord critiqué en France et en Allemagne notamment.
Mais cet engagement verbal n’a pour l’instant aucune valeur juridique. Il doit être rédigé puis être approuvé par les États membres de l’Union européenne (UE). En attendant, les négociations se poursuivent sur de nombreux points qui restent flous, par exemple savoir quels secteurs seront épargnés.
Ce mercredi 30 juillet, le gouvernement français a tenté de rassurer les acteurs de l’économie invités au ministère des Finances, en insistant sur le fait qu’il y a une marge de manœuvre possible : « Il reste, dans les prochains jours, des négociations extrêmement importantes. Mais ce que nous poussons de façon très claire, c’est une exemption pour le secteur des vins et des spiritueux en plus de l’aéronautique, parce que ce sont des économies qui dépendent beaucoup du marché américain, qui dépendent des exportations de façon importante en général et qui ne sont pas délocalisables et qui sont aussi l’identité de nos territoires, a déclaré Laurent Saint-Martin, ministre français du Commerce extérieur, lors d’une conférence de presse à Bercy. Et donc la priorité, c’est de se concentrer sur la fin de la négociation pour défendre au maximum nos intérêts. On n’en est pas du tout à se demander qu’il puisse y avoir un vote opposé ou pas. On est ensemble en Européens là-dessus, on est en soutien à la Commission et on veut le meilleur deal possible. »
L’espoir des « exemptions »
Emmanuel Guichard, délégué général de la fédération des entreprises de la beauté, faisait partie des dirigeants des filières conviés à la réunion au ministère de l’Économie ce mercredi. Il s’attend à ce que les droits de douane sur les parfums français et autres cosmétiques passent de zéro à 15 % de droits de douane à l’entrée aux États-Unis dès le 1er août.
Et il a désormais peu d’espoir que la filière obtienne une exemption de dernière minute : « Ce qui est sûr à l’issue de cette réunion, c’est que l’accord est quand même d’une nature assez complexe et donc il y aura un travail relativement long côté Commission européenne pour le rédiger. Ce qui peut laisser espérer, pour certains secteurs, plutôt dans le domaine agricole, qu’il y ait des exemptions pour les entreprises cosmétiques. Nous avons compris aujourd’hui qu’il n’y aura probablement pas d’exemption pour notre secteur, ce qui est une mauvaise nouvelle parce que les États-Unis, c’est notre premier marché et c’est pour cela que nous avons demandé des mesures pour amortir ce choc pour toutes les entreprises, notamment les entreprises de plus petite taille. »