Dans le communiqué du dernier Conseil des ministres, le président de la République a demandé au Premier ministre et à la ministre en charge des Sports, d’accélérer le processus d’adoption du nouveau Code du sport. Mais au juste, qu’est-ce qui va changer dans la gouvernance du sport sénégalais avec cette réforme ? En guise d’éclairage, Le Quotidien a sollicité l’expertise de l’ancien Directeur de la haute compétition (Dhc), Souleymane Boun Daouda Diop.Recueillis par Hyacinthe DIANDY – Le Sénégal va bientôt adopter une loi portant Code du sport pour remplacer la Charte du sport de 1984. Pouvez-vous nous dire ce qui va vraiment changer dans la gouvernance du sport sénégalais avec cette réforme ?
L’adoption du Code du sport constitue une étape historique. Depuis 1984, notre sport fonctionne avec une charte devenue obsolète face à l’évolution rapide du secteur : professionnalisation, économie du sport, émergence de nouvelles disciplines, lutte contre le dopage et la violence, gouvernance moderne, mais aussi prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme.
Ainsi, le nouveau code va clarifier et moderniser la gouvernance à plusieurs niveaux. Il précise les domaines de compétence et les champs d’action de l’Etat, du Comité national olympique (Cnoss), des fédérations, des ligues, des clubs et des collectivités territoriales.
Chaque acteur saura exactement ce qu’il peut faire et ce qu’il doit faire. Il introduit également des principes de bonne gouvernance : transparence dans la gestion, obligation de rendre compte, assemblées générales régulières, mandats limités.
En outre, il organise mieux le statut juridique des clubs afin qu’ils deviennent de véritables entités professionnelles, attractives pour l’investissement privé. Cela donnera un nouvel élan à la structuration de nos disciplines et de nos compétitions.
Et concrètement, quel sera l’apport de ce Code du sport pour la promotion et le développement du sport au Sénégal ?
L’apport attendu est considérable. D’abord, le Code du sport garantit une meilleure reconnaissance et protection des sportifs, qu’ils soient amateurs ou professionnels. Il pose les bases de leur couverture sociale, de leur sécurité sanitaire et de leur accompagnement pour la reconversion après carrière.
Ensuite, il diversifie les sources de financement : au-delà des subventions publiques, il ouvre la voie au mécénat, au sponsoring et aux partenariats public-privé. Grâce à cela, nos clubs et fédérations disposeront de moyens plus conséquents pour former, équiper et accueillir les sportifs dans de meilleures conditions. Ce code accorde également une place importante au sport pour tous, au sport féminin, ainsi qu’au sport scolaire et universitaire, afin de bâtir un vivier plus large de talents et de renforcer l’inclusion.
Enfin, il harmonise notre cadre national avec les standards internationaux, notamment en matière de lutte contre le dopage, de prévention de la violence et de promotion de l’éthique sportive.
Qu’est-ce qu’il faut pour que ces ambitions deviennent réalité ?
Toutes ces ambitions ne deviendront réalité que si un mécanisme efficace de suivi-évaluation est mis en place à tous les niveaux. C’est fondamental. Un texte, même le meilleur, reste lettre morte s’il n’est pas appliqué. La réussite de ce code dépend donc avant tout des hommes et des femmes chargés de sa mise en œuvre : Etat, dirigeants sportifs, techniciens, élus locaux, encadreurs, clubs, fédérations et sportifs eux-mêmes.
Chaque partie prenante doit remplir son devoir envers le code et envers le sport sénégalais. Sans engagement, sans rigueur et sans esprit de responsabilité, toutes les ambitions portées par cette réforme resteront de l’utopie. Car faut rappeler que le nouveau Code du sport est une réforme majeure dont l’efficacité et l’efficience dépendent avant tout des hommes et des femmes chargés de sa mise en œuvre.
Etes-vous optimiste ?
Oui, je reste convaincu que ce code peut être un levier puissant pour faire du sport un moteur de cohésion sociale, d’emploi et de rayonnement pour notre pays. Mais pour cela, chacun doit jouer pleinement sa partition. Plus que jamais, c’est l’affaire de tous.