Ce samedi 23 août 2025 à Tivaouane-La-Sainte, capitale de la Tijaniyya, où vont bon train les préparatifs en perspective du Mawloud-Al-Nabi commémorant la naissance du Prophète Mohamed (Paix et salut sur lui), qui sera célébré cette année le 5 septembre sous le thème : «Célébrer le Mawlid pour une société solidaire et unie», le message du Khalife général des Tidianes, Serigne Babacar Sy Mansour, a été délivré au cours du traditionnel point de presse marquant l’acte «1» posé dans le cadre du Gamou.
Une occasion pour le coordonnateur de la Cellule Zawiya Tijaniyya (Cezat), Serigne Abdoul Hamid Sy Al Amine, de passer au peigne fin les modalités de préparation de l’événement. Surtout de revenir en détail sur le programme d’animation scientifique et culturelle. Les autorités religieuses de Tivaouane ont rappelé l’orthodoxie du Gamou et délivré un message fort à l’endroit des millions de talibés qui convergeront vers la ville sainte dès l’ouverture des séances de Buurd, prévue en début de semaine.
Cette traditionnelle conférence de presse qui, chaque année, augure du dispositif organisationnel et communicationnel que le comité d’organisation et la Cellule Zawiya Tijaniyya partagent avec tout le monde, au nom et sous l’autorité du Khalife général des Tidianes, a été l’occasion de livrer le message de Serigne Babacar Sy Mansour, destiné à la communauté musulmane du Sénégal, aux disciples de la Tijaniyya, d’ici et d’ailleurs, aux plus hautes autorités de l’Etat du Sénégal.
Pour cette raison, et fidèle à l’héritage dont il est le garant le plus irréductible et le continuateur du legs transmis par ses illustres devanciers, le khalife, par la voix de Serigne Habib Sy Mansour, Sérigne Moustapha Sy Al Amine, responsable moral du Coskas, et du coordonnateur de la cellule de communication, Serigne Abdoul Hamid Sy Al Amine, coordonnateur de la Cellule Zawiya Tijaniyya, a instruit le comité d’organisation de retenir comme thème de cette édition : «Célébrer le Mawlid pour une société plus cohésive.» Le choix de ce thème, selon ses représentants, lui est dicté par le constat alarmant d’une «société humaine fracturée, où le vivre-ensemble et la coexistence pacifique des communautés sont devenus des chemins de croix».
Partout, s’offusque le khalife, de Gaza à Jérusalem, de Moscou à Kiev, d’Islamabad à Bombay, au Soudan, en Rdc, «des hommes et femmes partageant les mêmes origines et les mêmes valeurs, et parfois les mêmes espaces, s’empoignent ou s’étripent, méconnaissant l’océan de ce qui les unit pour ne voir que le petit filon, parfois artificiel, qui les sépare. Foulant en même temps aux pieds les principes sacrosaints de la fraternité humaine». Et pourtant, rappelle le marabout, le Coran nous exhorte à aller au-delà de nos différences et à apprendre les uns des autres.
Dans notre pays, constate amèrement le Khalife des Tidianes, «la situation, même si elle n’est pas plus catastrophique qu’ailleurs, n’en est pas plus reluisante. L’intolérance, l’insulte et les invectives, l’animosité et la violence se banalisent. Les valeurs fondamentales qui ont toujours fait notre fierté, sont devenues des anachronismes : la fameuse «kersa», le «wek», la parenté, le respect mutuel ont disparu de nos rapports sociaux». Il considère que «l’avènement des réseaux sociaux -on aurait dû les appeler : «les réseaux à-sociaux»- qui exploitent le mal-devenir des générations tardives perdues dans les limbes du désespoir, parce que mal guidées, mal instruites, moralement et spirituellement mal armées pour faire face aux vicissitudes de notre époque trouble, a fini de transformer notre vieille bonne volonté de vivre en commun en un inextricable instinct de vengeance et d’humiliation de son vis-à-vis».
Comment, se demande le guide religieux, sauver cette génération sinon que de l’attirer vers les enseignements du Prophète-guide (Paix et salut sur lui), les ramener à la source, les enraciner aux valeurs et vertus fondatrices de la vraie humanité telles qu’il l’a incarnée et continuera de l’incarner jusqu’à la fin des temps. Le Khalife général des Tidianes, Serigne Babacar Sy Mansour, selon Abdoul Hamid Sy, veut placer cette présente édition du Mawlid qui coïncide avec le 1500ème anniversaire du Meilleur des hommes, Seydina Muhammad (Psl), sous le sceau de la cohésion sociale et de l’unité retrouvée de la Nation sénégalaise.
Il en appelle ainsi à la bienveillance, à la vigilance et à l’exhortation des chefs religieux auprès de leurs fidèles. Il en appelle au sens des responsabilités et à la tempérance des hommes politiques pour davantage pacifier le champ politique. Il en appelle à la réconciliation des cœurs et des esprits des citoyens, de quelque bord qu’ils se situent, pour faire de ce pays ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être : une Nation tolérante et résolument engagée dans l’unité de tous ses fils et filles pour bâtir un devenir meilleur, en s’agrippant résolument à la corde de Dieu.
Mais, remarque le fils de Al Amine, il nous importe également de nous focaliser sur la première assertion de cette thématique : «Comment devons-nous célébrer le Mawlid ?» Devons-nous le célébrer en convoquant tout ce qu’abhorre celui par qui cette commémoration est devenue une institution ici au Sénégal, Mawlana Cheikh El Hadji Malick Sy qui, dans un de ses célèbres vers, met en garde contre les pièges du blâmable dans la commémoration de la Nativité du Prophète.
Les marabouts de Tivaouane rappellent qu’il y a donc bien une façon de reproduire le modèle prophétique. Et c’est vers cela, disent-ils, que Serigne Babacar Sy Mansour appelle tous les fidèles qui se dirigeront vers Tivaouane dans les prochains jours : par la purification des intentions, par le retour à Dieu et par la multiplication des actes d’adoration et des prières sur le Prophète (Psl). Selon eux, venir à Tivaouane pour cette occasion est un acte de pèlerinage. Rien ne doit y être tenu qui nous éloigne du chemin de grâce, celui qu’on emprunte pour espérer son intercession : donc ni excès, ni extravagances, ni mondanités, ni parades de biens. Rien de cela ne ressemble au Prophète Psl, rien de cela ne ressemble à Mawlaya Cheikh El Hadji Malick.
Une façon pour la capitale de la Tidianiyya de dire que c’est autour de la reproduction du modèle prophétique que va s’articuler toute la programmation scientifique et culturelle du Mawlid, suivant ainsi les enseignements de Cheikh El Hadj Malick Sy, mais également de ses muqaddams, modèles achevés de sagesse et de sainteté, tous taillés dans le cordeau et la rigueur intellectuelle de son université populaire, son séminaire mythique de Njarndé, qui a vu défiler pendant sept ans (de 1895 à 1902) des centaines d’étudiants mus par la seule quête du savoir, l’envie d’une orientation spirituelle saine et la volonté de transformation sociale par le travail partagé ( jang-julli bay : ja-ju-ba).