Clément Michel, DRH du groupe Keolis Droits réservés – DR – Keolis
11/04/2022 – Diversité, égalité hommes-femmes, management et inclusion dans les territoires… Clément Michel, DRH du groupe Keolis, explique à AEF info les ambitions portées par le groupe dans ce domaine.
Dépêche AEF
lundi 11 avril 2022 (10h38
Avec 68 000 employés dans 75 pays, Keolis est une société de transport public de voyageurs franco-québécoise qui exploite non seulement des réseaux de bus, de métros, de tramways ou de cars, mais aussi de vélos en location, de parkings, de navettes maritimes, de funiculaires, de trolleybus ainsi que des services aéroportuaires. Au niveau groupe, l’entreprise souhaite aujourd’hui mettre l’accent sur l’inclusion, tant en interne que dans sa démarche d’investissement et de développement de son activité.
AEF info : Vous avez récemment renouvelé vos engagements en matière de diversité et d’inclusion, à l’occasion de la semaine de la diversité organisée au sein de l’entreprise. Quels sont les grands principes de votre politique dans ce domaine aujourd’hui ?
Clément Michel : Marie-Ange Debon, présidente du directoire de Keolis, est arrivée fin août 2020 et a lancé assez vite un nouveau projet d’entreprise, « Keolis way », avec des objectifs ambitieux mais atteignables en interne et en externe, incluant la performance non financière.
Au sein du comité exécutif, nous avons été convaincus que c’était le moment de lier ces objectifs aux ambitions d’une entreprise citoyenne telle que la nôtre. Dans le cadre du refinancement de la dette du groupe, nous avons souscrit un crédit indexé sur des indicateurs de développement durable. Nous avons intégré un mécanisme d’ajustement de la marge lié à l’atteinte d’objectifs annuels en matière d’environnement, de mixité et de santé et sécurité.
AEF info : Sur cette question d’égalité, quel est le constat dressé, et quels sont vos objectifs ?
Clément Michel : J’ai consacré plusieurs mois à travailler sur la diversité en répondant à différentes initiatives et en me rapprochant d’acteurs comme le ministère de l’Égalité. Nous avons plusieurs objectifs : d’une part atteindre, d’ici 2025, la part de 24 % de femmes parmi les 68 000 collaborateurs de Keolis contre 21,7 % fin 2020, et 22 % en 2021. Nous comptons bien dépasser ce score. Et d’autre part, atteindre la part de 40 % de femmes dans le top 100 de l’entreprise, sachant que notre comité exécutif est déjà presque paritaire avec quatre femmes et cinq hommes.
Nous portons également des objectifs locaux, notamment en termes de management sur la diversité, adaptés aux contextes culturels. Dans certains pays, nous pouvons par exemple réaliser des statistiques sur la présence de telle ou telle communauté parmi nos effectifs, comme les Afro-Américains ou les Latinos aux États-Unis, afin de tendre vers une population de Keolis représentative des populations que l’on sert. En Australie, nous menons des campagnes pour intégrer davantage de femmes parmi nos collaborateurs. Au sein de notre filiale à Melbourne, nous comptons désormais 48 % de femmes dans nos recrutements depuis 18 mois.
Concernant l’index de l’égalité professionnelle français entre les femmes et les hommes, nous avons obtenu un score de 98/100 en 2021. Ce que nous devons améliorer, c’est la présence des femmes au sein des meilleures rémunérations de l’entreprise. L’indicateur a toutefois ses limites, car avec le Covid, nous n’avons augmenté personne, donc les différences entre hommes et femmes sur cet item n’ont pas encore pu être résorbées.
Sur la question du handicap enfin, nous participons tous les ans au salon de recrutement Hello Handicap, lors duquel nous avons recruté 10 % des candidats ayant postulé. Nous continuons notre travail, notamment au siège, notamment via la sensibilisation et le soutien à la reconnaissance.
AEF info : L’idée d’une entreprise inclusive, où tout le monde trouverait sa place perdure-t-elle après deux ans de crise sanitaire ? Cette notion a-t-elle évolué avec le travail à distance et les nouvelles formes de travail ?
Clément Michel : Les sujets d’inclusion sont des impératifs moraux, mais ils sont aussi liés à la vitalité et la résilience des territoires. Nous ne sommes pas simplement une usine dans un territoire. Notre raison d’être est de travailler sur un territoire plus durable. Lorsque nous exploitons un réseau de transport, nous réfléchissons à ce qui fait qu’une offre de transport est inclusive ou non. C’est fondamental.
Par exemple, la réduction de la pauvreté a un lien avec l’accès au transport. Dans certains quartiers de Boston, sur la côte est des États-Unis, quand nous avons repris l’exploitation du réseau de trains de banlieue en 2014, nous avons remarqué que celui-ci ne desservait pas l’ensemble du territoire, en l’occurrence les quartiers les plus défavorisés, ce qui correspondait à une discrimination très forte. Nous avons donc ajouté deux arrêts sur la ligne et adapté la gamme tarifaire avec l’autorité organisatrice.
AEF info : Comment travaillez-vous sur le rôle du manager aujourd’hui ?
Clément Michel : Nous travaillons en ce moment sur la notion de leadership. Pour cela, nous accompagnons les managers dans leur métier tous les jours, car ces derniers doivent gérer deux types de population : ceux qui ont travaillé en première ligne durant la crise sanitaire (les conducteurs et conductrices), et ceux qui ont eu télétravaillé, avec un risque de se sentir provisoirement plus éloigné de l’entreprise.
La mission du manager est d’écouter et d’entendre les frustrations potentielles ressenties par certains salariés. Avant, nous ne disposions pas de baromètre social, que nous avons mis en place mi-2020 pour disposer de données. Il s’agit là d’identifier l’ensemble des problématiques issues des situations réelles vécues par les salariés, de la plus minime à la plus handicapante, puis d’améliorer les choses.
En dépit du caractère décentralisé de l’entreprise, puisque nous comptons près de 300 filiales en France et à l’international, nous développons un référentiel managérial commun. Avoir un bon manager est fondamental pour permettre aux collaborateurs de s’épanouir et de progresser. Nous permettons donc à nos managers de bénéficier de programmes de développement dans un contexte d’internationalisation et de transformation du groupe, nécessaires pour nous adapter aux enjeux du changement climatique et notamment de la transition énergétique.
par Evelyne Orman