Il y a quelque chose de pathétique dans la démission hier du ministre de l’Ecologie François de Rugy. On se souvient en effet qu’il s’était fait le chantre de la transparence et de la lutte contre les abus dès son arrivée au perchoir de l’Assemblée nationale. C’est un peu le remake de l’histoire de l’arroseur arrosé. Il n’en reste pas moins que la publication de photos de repas fastueux à l’hôtel de Lassay étaient inacceptable pour une opinion publique encore traumatisée par la crise des gilets jaunes. En ce sens le ministre peut dire aujourd’hui avec une certaine amertume : « Homard m’a tuer »
Depuis quelques jours sa position était devenue intenable et entravait son action à un moment où il devait porter devant le parlement la loi sur la transition écologique considérée comme l’acte II du quinquennat d’Emmanuel Macron. Il appartiendra désormais à Elisabeth Borne, l’actuelle ministre des transports de le remplacer tout en conservant son propre portefeuille. En revanche elle ne prendra pas le titre de ministre d’Etat de son prédécesseur à précisé l’Elysée.
Dernière sortie le 14 juillet lors du défilé militaire
Sa présence à la tribune officielle lors du traditionnel défilé du 14 juillet aura donc été sa dernière sortie officielle mais depuis la semaine dernière, alors qu’il avait dû interrompre une visite dans les Deux-Sèvres – et que des manifestants brandissaient sur son passage des pancartes avec des homards – pour répondre à une convocation du Premier ministre à Matignon, on savait qu’il était en sursis.
La goutte d’eau qui a fait déborder le vase
Les dernières révélations de Médiapart, hier, concernant l’usage d’une partie de son indemnité représentative de frais de mandat vers les caisses de son parti de l’époque, Europe Ecologie-Les Verts aura été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Et on parle maintenant d’un usage peut être abusif d’une voiture de fonction et de voyages. Il devenait urgent d’arrêter les frais.
Une jurisprudence dangereuse
Reste qu’une question se pose désormais, est-ce qu’à chaque fois qu’un ministre sera mis en cause par Médiapart ou Le Canard enchaîné il devra démissionner ? Son départ risque de provoquer un précédent dangereux en instituant une nouvelle jurisprudence après la jurisprudence Balladur qui voulait qu’un ministre mis en examen démissionne. Dorénavant la justice médiatique primera-t-elle sur la justice de la République ? Déjà hier François de Rugy pointait du doigt l’acharnement de Médiapart en se comparant à Bérégovoy et en pensant aux mots employés par François Mitterrand qui rendait hommage à ce dernier : « Toutes les explications du monde ne justifieront pas qu’on puisse livrer aux chiens l’honneur d’un homme « . On peut aussi s’interroger si la France ne va prendre de plus en plus exemple sur les démocraties du nord de l’Europe, plus vertueuses en matière de deniers publics, tout le monde ayant encore en mémoire la démission d’une ministre suédoise pour avoir acheté avec la carte bancaire de son ministère une tablette de chocolat. Ces derniers jours on ne manquait pas non plus de rappeler qu’aux débuts de la 5ème République le Général de Gaulle avait fait installer à l’Elysée un tableau EDF indépendant du Palais afin de payer ses propres consommations d’électricité.
Député de la Loire Atlantique ?
Avec cette démission du ministère François de Rugy se trouve aujourd’hui dans la position de redevenir député de la circonscription de Nantes-Orvault à partir du mois prochain et d’occuper le logement social qui a fait récemment polémique. Voilà qui clôt une crise politique et met un terme à ce qui risquait de devenir au fil des jours le feuilleton de l’été ce que le pouvoir voulait éviter à tout prix ayant encore en mémoire l’été 2018 et l’affaire Alexandre Bennalla.
Jean-Yves Duval