Aux États-Unis, le plus long « shutdown » de l’Histoire américaine devrait se conclure ce mercredi 12 novembre. La Chambre des représentants devrait – sauf coup de théâtre – adopter l’accord voté au Sénat lundi 10 novembre qui pourrait mettre un terme à une paralysie budgétaire de plus de 40 jours. Le texte est source de dissensions dans le camp démocrate, puisque huit des sénateurs se sont rangé du côté des républicains et ont voté le texte, permettant d’atteindre la majorité.
Donald Trump a estimé mardi 11 novembre que la fin à venir de la paralysie budgétaire aux États-Unis représentait une « très grande victoire » pour les républicains, tandis que la colère monte chez les démocrates face aux sénateurs de leur camp qui ont voté pour mettre fin au « shutdown ».
Lors d’un discours au cimetière national d’Arlington, à l’occasion de la Journée des anciens combattants, le président américain a salué le travail des chefs républicains au Congrès, Mike Johnson et John Thune. « Félicitations à vous et à John et à tout le monde pour une très grande victoire », a déclaré Donald Trump à l’adresse du « speaker » de la Chambre, Mike Johnson, présent dans l’assistance. « Nous rouvrons notre pays, il n’aurait jamais dû être fermé », a-t-il ajouté.
Après plus de 40 jours de blocage, le Congrès américain s’apprête à voter un nouveau texte budgétaire qui permettrait de lever le « shutdown ». Le Sénat a adopté une proposition de loi qui prolonge le budget actuel jusqu’à fin janvier, et la Chambre doit en débattre à partir de mercredi, avec un vote attendu potentiellement dans la soirée. Il ne resterait alors que la signature de Donald Trump.
Une « trahison » tactique des démocrates ?
En raison des règles en vigueur au Sénat, plusieurs voix démocrates étaient nécessaires pour adopter un budget, même si les républicains y sont majoritaires. En apparence, c’est donc une capitulation majeure et définitive pour les démocrates. Car si la plupart des élus de l’opposition au Congrès ne voulaient pas de l’accord qui prolonge le budget fédéral actuel jusqu’à la fin du mois de janvier, certains ont rendu les armes et ont voté pour : huit sénateurs démocrates au total. « Le pays avant le parti », a posté sur X l’un d’eux, John Fetterman, élu de Pennsylvanie.
Certains à la gauche du parti, comme Bernie Sanders, dénoncent une trahison, d’autres avancent la concession arrachée aux républicains : l’organisation d’un vote séparé sur la couverture santé au mois de décembre. La couverture santé Obamacare pour les plus modestes cristallise les tensions entre les deux partis depuis un mois. Les démocrates en réclament l’extension pérenne.
Et c’est sur ce point que le vent pourrait tourner. Car si le vote a bien lieu, et si les républicains rejettent la prolongation de l’Obamacare, l’opposition en récolterait les fruits. C’est en effet le thème de la vie chère qui a fait gagner les derniers scrutins locaux aux démocrates. Ils pourraient l’emporter à nouveau lors des élections cruciales de mi-mandat en 2026.
Des sympathisants partagés entre incompréhension et déception
Pour l’heure, c’est l’incompréhension et la déception auprès des sympathisants démocrates. Devant cette librairie progressiste de Washington, tout le monde ou presque a voté démocrate et tout le monde ou presque se pose cette question : « mais qu’est-ce qui leur est arrivé ? », rapporte notre correspondant à Washington, Vincent Souriau.
« Moi aussi je me gratte un peu la tête », explique un passant. « Surtout maintenant, vu nos énormes victoires aux élections, qui voulaient dire : vous êtes en train de faire ce qu’il faut. Faire volte-face comme ça ? Ces huit démocrates, je pense que ce sont des gens bien, mais là, ils se sont trompés. Même si je reconnais que c’était un choix difficile »
Le dossier brûlant, c’était bien le maintien des subventions d’Obamacare, l’assurance-maladie des plus démunis. Les démocrates en avaient fait une question de principe, mais au bout du compte, ils n’ont obtenu aucune garantie solide. Et pour cette jeune femme rencontrée par notre correspondant, c’est incompréhensible.
« Quel était l’intérêt de tout ce “shutdown” si on se couche sur l’assurance santé ? Là, le financement va redémarrer sur la base d’une promesse bisounours des républicains, qui soi-disant vont donner suite, alors que ça fait dix ans qu’ils ne donnent suite sur rien », constate-t-elle. « Les dinosaures du Parti démocrate, je crois qu’il est temps de partir. C’est terminé. Les gens sont en colère », résume-t-elle.
Le « shutdown », dit-elle, était très douloureux. Mais les gens vont souffrir encore plus avec le budget que préparent les républicains.
«Shutdown»: un trafic aérien toujours perturbé
Depuis une semaine, la paralysie budgétaire affectait aussi le trafic aérien. Malgré la sortie de crise annoncée, la situation qui devrait perdurer pendant encore quelques jours.
De fait, les contrôleurs aériens continuaient à travailler, mais cela faisait 40 jours qu’ils n’étaient plus payés. Une situation qui a poussé certains d’entre eux à trouver un deuxième emploi dans le privé histoire de nourrir leurs familles, d’autres n’ont tout simplement plus de quoi payer l’essence de leur voiture pour se rendre au travail, et enfin, il y a ceux qui se sont fait porter pâle en signe de protestation.
Le résultat est le même : les aéroports manquent de personnel pour assurer la bonne tenue du trafic aérien, les avions font la queue des heures pour décoller à tel point que la semaine dernière l’administration Trump a été contrainte d’annoncer une réduction du trafic dans une quarantaine d’aéroports dont les plus fréquentés du pays. Plus de 1 000 vols sont donc annulés depuis lundi 10 novembre pour des raisons de sécurité, soit 4 % du trafic, 6 % ce mardi 11 novembre. Et fin du shutdown ou pas, un retour à la normale prendra du temps, ce chiffre va donc continuer de monter pour représenter jusqu’à 1 vol sur 10 annulé aux États-Unis d’ici à vendredi prochain.
RFI

