Un an déjà, Ndukur le « Passant »

« Abdou était un ami rencontré à Paris au restau grand place paris 11 parmentier. Avec Sam Ba , seydina M’baye, Cherif sy, etc nous animions des conférences musclées-ASI. Abdou avait toujours une approche singulière qui me fascinait. je garde un excellent souvenir de ces moments et après je l’ai retrouvé via Facebook. Pape B Cissoko.  Paris

Il y a un an, la Casamance, le monde universitaire et notre Sénégal tout entier perdaient l’un des leurs. Mon jeune frère, mon ami, mon conseiller. Un an déjà que tu as rejoint l’au-delà, Ndukur Kacc Essiluwa Ndao. Le deuil n’a pas érodé le souvenir de ton sourire, ni le choc de ton départ subit. Mais il nous permet, aujourd’hui, de nous incliner non plus devant l’instant de ta mort, mais devant le sens de ta vie.

Un engagement forgé dans les flammes

Je me souviens de nous, étudiants et élèves, unis dans les combats des années dites « de braise », 1987-1988-1989. C’est là, au cœur de ces journées bouillonnantes, que nous avons tissé une amitié indéfectible. Tu n’étais pas un militant de façade, mais un penseur en action, dont le verbe, déjà, portait en lui la force et la droiture de tes convictions. C’était le point de départ d’une route que nous allions parcourir ensemble, où ton esprit libre allait toujours guider mes pas.

Le discret conseiller

Peu de gens le savent, mais tu étais mon conseiller politique. Ton esprit vif, ta sagacité d’anthropologue et ta hauteur de vue m’ont été d’un soutien inestimable. Tu avais cette capacité unique d’analyser les dynamiques les plus complexes, de déconstruire les évidences et d’orienter avec lucidité et franchise. Tu étais mon « démineur » personnel, non pas des terres, mais des idées, me protégeant des sentiers tortueux.

Le démineur des cœurs de la Casamance

C’est sans doute en Casamance que ton génie s’est le plus révélé. Pendant que d’autres s’impatientaient ou s’enlisaient, tu as réussi l’impossible : conquérir la confiance d’une région « imprenable », notamment à Oussouye. Tu as prouvé que l’on pouvait transformer le « verbe haut » en action concrète et que le dialogue, la connaissance et l’empathie étaient les armes les plus efficaces pour désamorcer les conflits. Tu as semé la paix dans les cœurs, avant de rêver de la voir fleurir sur les terres libérées de toute mine.

Une liberté qui fait école

Ndukur, tu as été une voix essentielle. Par ta rigueur, tu as montré qu’un intellectuel devait être un critique, un analyste et non un perroquet. Tu as déconstruit les théories éculées pour y mettre la vie, la culture, et l’humain. Tu as été un fervent défenseur de la liberté d’opinion, une sentinelle républicaine qui ne craignait pas d’être « décalée », car tu savais que le progrès naissait de la confrontation des idées, non de la pensée unique.

Un an après ton départ, ton héritage demeure intact. Je continue à entendre le souffle de ta sagesse et à me nourrir de ta mémoire. Repose en paix, Ndukur Kacc Essiluwa Ndao. Que la terre de Camberène te soit légère. Ton souvenir est gravé dans nos cœurs pour toujours.

Talla Sylla