Un geste symbolique à fort impact pour les populations
Ces derniers jours, un débat salutaire s’est ouvert autour du Sukërou Koor, cet appui financier accordé depuis des années aux députés pendant le mois de Ramadan. En suivant de près les prises de position du groupe parlementaire Pastef, plusieurs clarifications s’imposent pour mieux saisir la portée de cette renonciation.
Il faut d’abord rappeler que l’Assemblée nationale dote chaque groupe parlementaire d’un budget, à l’intérieur duquel figurent diverses lignes de dépenses. Le Sukërou Koor fait donc partie des pratiques budgétaires internes aux groupes, mais il est financé par les deniers publics via le budget de l’Assemblée nationale. Il serait donc incorrect de dissocier totalement l’Assemblée nationale de ces dépenses internes.
Or, les députés de Pastef ont évoqué une somme de 100.000 F CFA par député au titre du Sukërou Koor. En faisant une simulation avec les 130 députés de ce groupe parlementaire, on obtient une enveloppe globale de 13 millions de F CFA. Si ces parlementaires décident collectivement de renoncer à cette ligne budgétaire (considérant qu’ils ont déjà reçu des avances sur salaires), ces 13 millions ne seront pas dépensés d’ici la fin de l’année.
Conséquence directe : un report à nouveau de ces 13 millions pour le budget 2026, qui permettra un ajustement à la baisse de la dotation de l’Assemblée nationale. Ces ressources peuvent alors être réorientées vers des besoins prioritaires, comme l’achat d’ambulances pour les zones enclavées, à l’image de Kidira.
Autrement dit, un simple renoncement de 100.000 F CFA par député peut permettre l’acquisition d’un équipement vital pour des populations rurales qui, trop souvent, attendent des heures avant de recevoir les premiers soins d’urgence. Ce geste prend ainsi une dimension sociale forte, bien au-delà de sa valeur monétaire.
Ce débat met aussi en lumière un principe fondamental de bonne gouvernance : les gestionnaires publics n’ont aucune obligation morale ni administrative de consommer l’intégralité de leurs budgets. Une dépense budgétisée mais non pertinente peut – et doit – être évitée.
C’est dans ce sens que s’inscrit la décision du Premier ministre, annoncée dans sa Déclaration de Politique Générale, de mettre en place à partir de 2026 un Budget à Base Zéro (BBZ). Ce type de budget rompt avec les habitudes héritées de l’administration : chaque dépense devra désormais prouver son utilité réelle et son efficience, pas seulement son efficacité théorique.
En définitive, il faut saluer cette démarche de rupture, incarnée par l’honorable député Guy Marius Sagna, qui fait du Jub-Jubal-Jubbanti une réalité dans la gestion des finances publiques. Ce débat n’est pas anecdotique : il marque le début d’un changement de culture budgétaire, plus responsable, plus équitable et au service du peuple.