Johnny Clegg, le zoulou blanc est mort

La mort de Johnny Clegg survenue à Johannesburg, mardi 16 juillet à l’âge de 66 ans, m’a brulement renvoyé à une série de reportages que j’ai effectués en Afrique du Sud voici un peu plus d’une vingtaine d’année. Souvenirs, souvenirs.

A cette époque le chanteur, né à Bacup au Royaume-Uni, était déjà très populaire dans ce pays. Son genre de musique Afro pop et rock pop était apprécié dans le monde entier depuis 1976, il était aussi reconnu comme un grand compositeur interprète sud-africain et danseur zoulou. Mais c’est surtout sa lutte contre l’apartheid qui l’a rendu célèbre car toute sa vie Johnny Clegg a été un défenseur inlassable de la culture africaine contre la ségrégation radiale qui sévissait dans le pays. Avec son célèbre tube Asibonanga (2018) il a notamment tenu à rendre hommage à Nelson Mandalela, le leader de l’ANC, alors incarcéré depuis durant vingt-sept ans. Depuis mon hôtel au Cap je me souviens d’avoir aperçu au large l’île de Robben Island où celui-ci était incarcéré sous la matricule 46664. Quelques années plus tard Madiba sera élu premier Président noir d’Afrique du Sud avant de recevoir en 1993, avec Frederick de Klerk (le dernier président de l’apartheid) le prix Nobel de la paix. A la même époque j’effectuais une série de reportages dans différents townships à Durban, au Cap et  dans le plus célèbre d’entre eux, celui de Soweto à Johannesburg, ainsi qu’une interview du chef zoulou dans sa province du Natal.

La nation arc en ciel

Dans le même temps Johnny Clegg continuait à se produire sur scène et à délivrer en musique son message de paix et de réconciliation qui aboutira à faire de l’Afrique du Sud, selon les vœux de l’archevêque anglican Desmond Tutu la nation arc-en-ciel, à savoir une société post-raciale qui mit fin à une domination blanche tricentenaire. grâce à l’instauration d’une commission dite « vérité-réconciliation ». Comme on le voit Johnny Clegg a été plus qu’un chanteur, un danseur en dépit de son talent reconnu et apprécié unanimement. Il contribua lui aussi à la réconciliation entre deux communautés que les origines et les convictions opposaient.

Le Zoulou blanc s’est éteint

Le Zoulou blanc souffrait depuis 2015 d’un cancer du pancréas et avait bénéficié de trois rémissions ce qui lui faisait dire  » quand un zoulou se bat c’est pour survivre ». Et depuis quatre ans il avait décidé de faire un pied-de-nez à la mort à travers une dernière tournée mondiale pour laquelle il trouva l’énergie de monter sur scène et de délivrer, une fois encore, un message de fraternité. Il a ainsi produit de très beaux concerts en France, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Puis le temps est venu où ce personnage public s’est retrouvé seul face à la mort et cet été il a su que son combat était inutile lorsqu’on lui a appris l’existence de deux tumeurs au poumon. Son fils de 31 ans, Jesse lui a écrit une chanson sur sa maladie, une façon de lui rendre hommage.

Hamba Kahle Johnny !

Le 16 juillet dans sa maison de Johannesburg Johnny Clegg s’est éteint, le garçon blanc au talent de musicien Zoulou, et avec lui ont disparus un ambassadeur de la paix et une magnifique voix chargé d’émotions. En quarante-deux années de carrière il aura vendu plus de 5 millions d’albums, Renaud lui a dédié sa chanson « Johathan », et avant lui Serge Gainsbourg lui avait consacré une chanson : Zoulou.  Une de ses dernières sorties aura été :  » Le voyage que j’ai commencé quand j’avais 14 ans touche aujourd’hui à sa fin ». Hamba Kahle Johnny ! (Adieu en zoulou).

Jean-Yves Duval, Directeur Ichrono