« Extinction Rebellion », un groupe de « blancs très éduqués »

Selon un groupe d’universitaires au Royaume-uni qui a étudié le mouvement, ce dernier manque de diversité. Et c’est également le cas en France.

EXTINCTION RÉBELLION – Des “rebelles”, des “non violents” de tous les horizons… ou presque. Quelques centaines de militants et sympathisants du mouvement écologiste Extinction Rebellion (XR) ont passé une deuxième nuit sur la place de Châtelet et un pont de la Seine, au centre de Paris, pour réclamer davantage d’action contre le réchauffement climatique. Depuis lundi 7 octobre, ils ont prévu des actions coup de poing dans la capitale, à l’instar de ce qui se fait dans 60 villes du monde.

Mais qui sont ces militants qui ont choisi la désobéissance civile pour sauver l’environnement? Le HuffPost s’est entretenu avec plusieurs de ces “rebelles” mobilisés à Châtelet ce mardi. Des adolescents, des retraités, des familles, des étudiants… à l’image des gilets jaunes qui ne les portent pas dans leur cœur, les membres d’Extinction Rébellion semblent éclectiques; du moins à première vue.

“On vient d’un peu partout pour cette mobilisation cette semaine. Il y a des militants de Marseille, Morlaix, Nice, Lyon, Quimper… Tout le monde peut nous rejoindre”, explique au HuffPost Antonin*, l’un des “rebelles”. “Bon, c’est vrai qu’une tendance se dégage plus particulièrement pour des individus de 25/35 ans ayant fait des études supérieures”, tempère un autre militant chargé de presse du mouvement.

Une majorité de “Blancs, très éduqués”

Une tendance observée dès les origines du mouvement dans ses rangs au Royaume-Uni, d’où Extinction Rébellion essaime un peu partout dans le monde. Un groupe d’universitaires a étudié le mouvement et remarqué qu’il manquait particulièrement de diversité. “Même s’ils essaient de s’ouvrir, ses membres sont essentiellement des Blancs, très éduqués et issus du secteur public, des professions libérales ou de l’économie créative”, analyse Graeme Hayes, professeur à l’université d’Aston, dans une étude citée par Le Monde.

Un profile à l’image des créateurs du mouvement: Gail Bradbrook, 47 ans, diplômée en sciences moléculaires et opposante au gaz de schiste est la créatrice du mouvement Rising Up! qui a donné naissance à Extinction Rébellion. Simon Bramwell, un ancien ouvrier de 46 ans reconverti en moniteur de stages de survie et Roger Hallam, un agriculteur bio de 52 ans, l’ont rejointe pour co-fonder le mouvement. Tous disent s’inspirer de la lutte pour les droits civiques des Noirs américains ou de Mahatma Gandhi en Inde.

“C’est vrai, on a une surreprésentation de ce type de personnes dans notre groupe français. De fait, on essaie de s’ouvrir pour toucher le plus de monde possible. C’est ce qu’on a essayé de 5 octobre lors de l’occupation du centre commercial d’Italie 2”, nous explique un porte-parole du mouvement. “Ce jour-là étaient invités différents collectifs et mouvements tels que les gilets jaunes, les gilets noirs (collectif de sans-papiers), le Comité pour Adama (en référence à Adama Traoré, ndlr), Green Peace, Attac … Nous avons eu toute la journée pour discuter et échanger sur les objectifs de XR et nous faire connaître. Classe moyenne, populaire, aisée, atteindre des personnes haut-placé ou juste des étudiants: nous ne voulons pas rester dans l’entre-soi, car nous sommes dans un mouvement citoyen et nous devons avoir une diversité à l’image de la France”, poursuit notre interlocuteur. “Peut-être que cette tendance peut s’expliquer par le fait que cette population est généralement plus encline à s’informer et à avoir accès aux réseaux d’informations. Elle a peut-être une volonté plus forte de se ’conscientiser″, tente de justifier Lucas, un autre “rebelle”.

Dix principes, quatre revendications et la non violence

Pour toucher le plus monde possible, Extinction Rébellion a tenté de faire tomber toutes les barrières à l’entrée du mouvement. Il est ainsi très simple de le rejoindre, sans verser un centime. Deux critères doivent être remplis: d’une part il faut comprendre ses quatre revendications, d’autre part adhérer à ses dix principes fondamentaux indiqués sur son site, dont tout particulièrement celui de la non violence lors des manifestations.

“Pour être un ‘rebelle’, il n’y a pas besoin d’être un militant acharné qui va dormir toute la nuit dehors lors des occupations ou qui va se laisser arrêter par la police pour la cause. Vous pouvez aussi simplement passer quelques heures pendant une marche, ou nous accorder un peu de temps pour les groupes de réflexion, note un porte-parole. Le tout c’est de faire ça de manière pacifique, car les tactiques non violentes sont les plus efficaces.”

Cette semaine, de multiples actions vont être menées dans la capitale et dans le monde pour faire encore davantage connaître Extinction Rébellion et son combat. “Une fois que les gens connaîtrons notre combat et notre façon de le mener, nous pourrons mobiliser 3,5% de la population, explique-t-on chez Extinction Rébellion. Car selon Erica Chenoweth, professeure en politiques publiques à la Harvard Kennedy School, dont le mouvement s’inspire, ce chiffre est le seuil à atteindre pour déclencher un réel changement de système, une révolution non violente”.

Claire Tervé

(*) Le prénom a été changé

À voir également sur Le HuffPost: https://www.huffingtonpost.fr/entry/comment-extinction-rebellion-