Le racisme, ce poison qui tue notre part d’humanité.

Le meurtre aux Etats-Unis de George Floyd réveille le vieux démon du racisme qui sommeille au plus profond de l’homme depuis la nuit des temps. La race, la couleur, la confession religieuse témoignent des différences qui ont construit l’humanité qu’elle enrichit. Malheureusement certaines idéologies les ont récupérées pour bâtir des programmes de politiques basés sur la haine. Tant que nous n’aurons pas extirpé ce poison de nos communautés des femmes et des hommes continueront de mourir victimes de la xénophobie et de l’ostracisme d’éléments les plus radicaux de nos sociétés.

L’Amérique a la mémoire courte après avoir édifié la prospérité de son industrie, de ses mines et de ses plantations de coton grâce à l’esclavagisme, comme la France coloniale qui a exploité, quand ce n’est pas pillé, les richesses de l’Afrique. Nous devrions au contraire marquer à l’homme noir notre reconnaissance. Sans oublier les dizaines de milliers d’africains qui sont venus se battre en Europe en 14-18 et en 39-45 et sont morts pour nous sauver de l’esclavage nazi et restaurer notre liberté. Comme nous avons la mémoire courte !

De la même manière qu’une hirondelle ne fait pas le printemps les agissements criminels de certains policiers américains et français ne représentent pas la généralité des comportements de nos forces de l’ordre. Aux Etats-Unis je ne sais pas, mais ici en France il y a une longue et forte tradition républicaine chez nos policiers, quoi qu’en pense Jean-Luc Mélenchon. Ce n’est pas sans raison qu’en décembre 1944 le général de Gaulle en créant les CRS, qui remplaçaient les Groupes mobiles de réserves, les a appelés : Compagnie Républicaine de Sécurité.

Malheureusement depuis toujours les mouvements politiques de tous bords se sont livrés à de l’entrisme dans les rangs des forces de l’ordre les polluant parfois d’une idéologie nauséabonde. Au demeurant un policier a le droit d’avoir des convictions politiques comme chaque citoyen de ce pays. Dès lors qu’elles sont démocratiques. C’est différent lorsqu’elles émanent de mouvements extrémistes qui rejettent le noir, le négro, le maghrébin, le bougnoule, etc. car derrière ces appellations péjoratives, derrière les mots, il y a souvent la haine de l’autre et le délit de faciès n’est pas loin. Dès lors une simple vérification de papiers, banal avec un blanc, peut tourner à la tragédie.

Quand, aux USA, vous êtes policier et sympathisant du Ku Klux Klan, ou des thèses des suprémacistes blancs, il n’y a rien d’étonnant à tenir des propos ignobles et à avoir des gestes violents à l’égard de personnes qu’on vous a appris à détester. C’est dans votre ADN. Résultat, le policier incriminé dans la mort de George Floyd va être poursuivi pour meurtre et ses collègues considérés comme complices vont devoir eux aussi répondre de leur comportement.

Quand, en France, vous êtes policier et sympathisant de mouvements de l’ultra droite, il n’y a rien de surprenant à ce que les injures racistes fusent lors d’un contrôle d’identité au motif du délit de sale gueule et que des violences les accompagnent. Cela paraît naturel, évident.

C’est inacceptable, aussi bien en Amérique qu’en France car les forces de l’ordre qui sont là pour faire respecter la loi doivent en premier donner l’exemple et la respecter. On doit attendre d’elles plus que du citoyen lambda précisément parce qu’elles portent un uniforme et qu’elles sont là pour faire régner la justice dans le pays.

Sinon elles sont sources de chaos et mettent le feu dans le pays comme on le voit depuis quelques jours un peu partout dans le monde. Nos sociétés ne peuvent pas davantage accepter de policiers « meurtriers » (seuls les juges le diront) que de policiers ripoux.

C’est inacceptable et répréhensible et les sanctions doivent être exemplaires à l’égard de ceux qui franchissent la ligne jaune. Tout comme la justice doit être impitoyable à l’égard de ceux qui ne respectent pas les lois de la République et estiment que parce qu’ils sont noirs ou maghrébins ils peuvent tout se permettre. La loi doit être la même pour tous et être appliquée de la même façon par ses représentants.

Je voudrais terminer sur une note d’espoir car dans toute épreuve il faut savoir tirer des enseignements pour éviter que les erreurs se reproduisent. Kipling avait tellement raison dans son célèbre poème « Tu seras un homme mon fils » de dire que nos différences, loin de nous diviser, nous enrichissent. Soyons heureux de vivre dans des sociétés, non pas uniformes, mais pluriculturelles, pluriethniques, et cessons de voir l’autre comme un « ennemi » mais comme un ami, un frère en puissance et en devenir, pour peu que nous lui tendions la main. Chacun sait que Leopold Sédar Senghor fut un député et un homme d’Etat français avant de devenir un grand président Sénégalais, qu’il a été aussi le premier africain à siéger à l’Académie française. J’ai reproduit ci-dessous les mots de ce très grand poète amoureux de notre pays. Puissions-nous méditer sur son message.

« Cher frère blanc,

Quand je suis né, j’étais noir, quand j’ai grandi, j’étais noir, quand je suis au soleil, je suis noir, quand je suis malade, je suis noir, quand je mourrai je serai noir.

Tandis que toi, homme blanc, quand tu es né, tu étais rose, quand tu as grandi, tu étais blanc, quand tu vas au soleil, tu es rouge, quand tu as froid, tu es vert, quand tu es malade, tu es jaune, quand tu mourras tu seras gris.

Alor, de nous deux, quel est l’homme de couleur ?  »

Puissent ces mots de paix être plus forts que tous les mots de haine.

Jean-Yves Duval, Directeur d’Ichrono