J’avais besoin d’un verre (voire plus) pour avoir des relations sexuelles avec mon mari – BLOG-Les maux de la vie

J’avais la vague idée que les gens normaux n’ont pas besoin d’être éméchés pour désirer leur partenaire.

Par Laura Cathcart Robbins, Contributeur

Rédactrice indépendante, conférencière et conseillère scolaire

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Age Barros via Getty Images

Devant mon mari, je buvais raisonnablement depuis notre mariage. Mais je complétais ma consommation d’alcool pré-sexe par une prise occasionnelle de Vicodin (plus difficile à déceler que l’alcool, et plus facile à cacher). (image d’illustration)

Dans la salle de bain de l’hôtel, j’ai mis du rouge à lèvre avant d’ôter ma robe fourreau. Je me souviens d’avoir pensé qu’avaler un somnifère avec du Champagne, au cas où je n’aurais pas envie de me lever plus tard, était une bonne idée. La dernière chose qui me revient, c’est d’être entrée dans la chambre, nue avec des talons hauts, en annonçant que j’étais prête.

Mon petit ami (qui deviendrait mon mari) m’a raconté qu’il m’avait fait prendre l’ascenseur vêtue du peignoir blanc de l’hôtel, que nous avons traversé le hall Mondrian et que nous sommes montés dans une voiture. Mais je ne me souviens de rien car je ne suis “revenue à moi” que lorsque le médecin des urgences m’a secouée doucement en répétant mon prénom.

“Combien de verres avez-vous bu ce soir?” m’a-t-il demandé. Je me suis efforcée de garder les yeux ouverts malgré l’envie irrépressible de me rendormir et je me suis entendue répondre que j’avais bu quelques verres et pris un Ambien de 10 mg. J’avais tellement de mal à articuler que je ne reconnaissais pas ma voix.

 

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“Un Ambien?” a répété mon petit ami, l’air à la fois choqué et déçu.

“Combien de verres exactement?” a insisté demanda le médecin, d’un ton légèrement impatient.

“Cinq ou six”, a répondu mon petit ami.

Un sentiment d’humiliation a commencé à envahir mon cerveau embrumé quand j’ai compris que je m’étais apparemment évanouie durant l’acte pour lequel je m’étais préparée en buvant.

Trois femmes sur quatre disent préférer boire avant d’avoir des relations sexuelles, car l’alcool les désinhibe et leur permet de mieux vivre leur sexualité. En d’autres termes, une fois pompettes, de nombreuses femmes non mues par la passion peuvent enfin se faire plaisir. Et 14% des femmes interrogées dans une enquête (en anglais, NDLR) menée en 2019 ont déclaré avoir besoin de boire pour pouvoir coucher avec leur moitié. J’appartenais résolument à cette catégorie.

Jamais de sexe dans alcool

J’avais déjà dépassé les bornes mais jamais à ce point. Avant cet épisode, c’était assez simple et civilisé: nous sortions dîner, nous nous soûlions puis nous faisions l’amour. Mais ses tentatives d’approche ont désormais eu lieu après un film ou un déjeuner, sans que ni lui ni moi n’ayons bu quoi que ce soit. Je craignais qu’il ne se soit lassé de notre accord tacite, selon lequel tout acte sexuel devait s’accompagner au préalable d’une consommation généreuse d’alcool. J’avais aussi comme la vague idée que les gens normaux n’ont pas besoin d’être éméchés pour désirer leur partenaire, mais je pensais que la raison pour laquelle nous étions si bien ensemble était qu’il appréciait notre “arrangement”.

Il est devenu évident que nous ne buvions pas pour les mêmes raisons: il aimait faire la bringue avant une partie de jambes en l’air tandis que je devais faire la bringue pour être d’humeur. Après ce surdosage et cet épisode honteux aux urgences, j’ai su que nos “sorties bringue” étaient derrière nous, que je travaillerais sans filet lorsque nous aurions des relations sexuelles, car il me surveillerait pour s’assurer que cela ne se reproduise plus.

L’alcool en cachette avant le sexe

Devant lui, je buvais raisonnablement depuis notre mariage, quatre ans auparavant. Mais je complétais ma consommation d’alcool pré-sexe par une prise occasionnelle de Vicodin (plus difficile à déceler que l’alcool, et plus facile à cacher). Je ne prenais rien depuis deux semaines et j’espérais qu’après une journée de travail il serait trop fatigué pour s’apercevoir de ma froideur. Après avoir mis nos deux fils au lit, j’ai tenté de m’occuper jusqu’à ce que sonne l’heure de prendre mon somnifère. Lorsqu’il est rentré, il est passé devant moi sans me regarder et a ouvert la porte du réfrigérateur.

“Les enfants ont déjà mangé mais je peux te préparer quelque chose”, ai-je dit.

“Tu as encore mangé avec eux?”

“Oui.”

Je suis épuisée de faire semblant en permanence. Lorsque je me suis approchée de lui pour attraper le morceau de saumon dans le frigo, mes mains tremblaient.

Plus tard, après être allée voir si les garçons dormaient, j’ai voulu me glisser discrètement sous les draps. Mais sa respiration s’est adoucie quand j’ai tiré la couverture.

Mince, je l’avais réveillé.

J’ai essayé de ne pas me raidir quand il a tendu son bras vers moi. Je me suis mordillé la lèvre inférieure pour m’empêcher de tressaillir sous ses doigts qui, rapidement, ont trouvé le plat de mon ventre sous mon haut de pyjama et commencé à en explorer la surface.

Je me suis concentrée pour rester complètement immobile.

Trente secondes plus tard, je n’en pouvais plus et je me suis redressée (aussi nonchalamment que possible) pour attraper la télécommande posée sur ma table de nuit.

″Ça te dérange si je mets un peu la télé?” J’ai détesté l’inflexion de ma voix, implorante comme celle de notre fils de trois ans quand il nous demande en pleine nuit s’il peut dormir avec nous.

Il m’a regardée fixement, ses yeux bruns animés par un sentiment que je ne parvenais pas à déchiffrer. Était-ce du ressentiment ou de la frustration? Et puis il a poussé un gros soupir avant de me tourner le dos.

“Comme tu veux, je vais dormir.”

J’ai fermé les yeux, expiré en silence et me suis détournée de lui pour regarder la télévision.

***

Le divorce prévisible

Que nous ayons fini par divorcer n’a donc pas été une surprise.

Quel homme sain d’esprit voudrait rester marié à quelqu’un qui évite à tout prix d’avoir des relations sexuelles avec lui? Si j’ai été dévastée de quitter nos enfants ― même pour une courte période ―, j’ai reconnu que j’avais besoin d’aide. Je suis donc partie en cure de désintoxication où j’ai passé les 27 jours les plus atroces de ma vie.

Selon la brochure, il fallait s’attendre à éprouver un sentiment intense de solitude ou de vulnérabilité quand je reviendrais dans mon “environnement familial”. Je me sentais tellement mal sans alcool, sans pilules ou tout autre expédient habituel que j’avais l’impression de ne plus savoir faire quoi que ce soit. Le soir, après avoir couché les garçons, j’éprouvais un malaise si profond que j’avais envie de tout ce qui aurait pu l’atténuer.

Je ne m’attendais pas à rencontrer Scott.

Guide de pêche à la mouche, il avait quitté l’Utah pour Los Angeles dans le but d’arrêter de boire. Nous avons tout de suite accroché, ressenti cette espèce d’euphorie qui, en général, ne présage rien de bon. Je ne voulais pas que ça tourne mal, je voulais rester sobre, être une bonne maman et avoir la meilleure relation de coparentalité possible avec mon ex-mari.

Avec Scott, j’ai mieux compris la loi de l’attraction. J’étais fascinée par ses yeux bleus et sa petite barbe blonde. Il me donnait envie de m’habiller sexy. Je trouvais n’importe quel prétexte pour le toucher. Bref j’étais complètement sous le charme.

Redécouverte du sexe à jeun

La première fois que nous avons fait l’amour, c’était dans une chambre d’hôtel. Je me suis déshabillée rapidement avant de me glisser sous la courtepointe à motifs cachemire tandis qu’il en était encore à enlever ses chaussures. Je l’ai regardé ôter sa chemise. Il parlait à toute vitesse mais je ne l’écoutais pas; j’admirais son torse nu, mince et bronzé. Mes yeux sont ensuite descendus jusqu’à ses sous-vêtements car j’étais curieuse de voir ce qui se cachait dessous, mais il s’est glissé trop vite sous les draps.

C’est aussi la première fois que je me retrouvais dans une chambre d’hôtel avec un homme sans avoir passé la soirée accoudée au bar ou vidé le minibar. Lorsque j’ai senti la chaleur de son corps à côté du mien, j’ai commencé à paniquer. Je me suis soudain rendue compte combien j’étais mal à l’aise quand j’étais sobre. J’ai étouffé un petit cri lorsque ses pieds ont touché les miens, non pas parce qu’ils étaient froids mais parce que je pouvais vraiment les sentir. Le tic-tac de sa montre près de mon oreille me faisait penser à un métronome, ou à une bombe. Je me suis un peu écartée, en réprimant une envie irrésistible de courir à la salle de bain.

Quand il m’a embrassée, quelques secondes plus tard, ses lèvres avaient encore le goût de son latte vanille.

Ce n’était pas notre premier baiser, mais le premier en privé, le premier qui nous amènerait à aller plus loin. Je trouve injuste que les personnes sobres ne puissent pas se protéger derrière quelque chose, n’importe quoi, pendant un moment aussi intime. J’aurais aimé avoir fumé, bu du Redbull, du sirop de chocolat, n’importe quoi pour éviter d’être aussi embarrassée par ma nudité.

Tout à coup, l’expression “mise à nu” a pris une tout autre sens, celui d’une plaie ouverte et visible. J’ai fermé les yeux tandis qu’il se penchait vers moi, en me préparant au pire.

***

Il a fallu au moins un an avant que Scott et moi puissions rire de cette nuit-là et nous émerveiller de la maladresse avec laquelle nos deux moi sobres redécouvraient le sexe. C’est un homme très patient, ouvert et honnête dans ce domaine. Onze ans plus tard, il me fait toujours comprendre qu’il n’y a aucun problème à demander des choses, expliquer ce qui me plaît et ne me plaît pas.

Je pensais que mon désir sexuel avait disparu à jamais, comme une marchandise avariée qu’on a dû jeter. Comment pouvais-je imaginer que le fait de ne pas boire améliorerait nos rapports, car l’intimité n’en est que plus grande, une fois les maladresses des débuts passées? Comment pouvais-je savoir que mon désir n’était pas éteint mais juste endormi, comme un saule en hiver?

Pour moi, le sexe à jeun est une activité comme une autre. Comme faire de l’exercice, de la méditation ou manger sainement. Et, comme pour toute activité, si on ne la pratique pas régulièrement, on en perd les bénéfices.

Je ne suis pas prête à perdre ce que j’ai trouvé.

Ce blog, publié sur le HuffPost américain, a été traduit par Karine Degliame-O’Keeffe pour Fast ForWord.

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